Deux points de vue sur la solidarité entre générations durant la crise du coronavirus

La solidarité entre les générations au cours de la pandémie est un thème central et essentiel pour la cohésion au sein de la société. C’est notamment pendant la crise du coronavirus qu’il est apparu de plus en plus clairement qu’une solidarité en-dehors de la famille était, est et sera indispensable. Qu’en est-il actuellement de la solidarité entre les générations? Quelles sont les principales préoccupations des jeunes et des moins jeunes? Quelles sont les points critiques et que faut-il pour développer la solidarité extra-familiale? Intergeneration a demandé à deux responsables d’en parler, l’une intervenant dans le domaine de la jeunesse, l’autre dans celui des seniors. Katja Schönenberger, Directrice de Pro Juventute, et Alain Huber, Directeur de Pro Senectute, nous ont chacun donné leur point de vue dans un billet de blog. 

Pour lire la contribution de Pro Juventute «La jeunesse au cours de la pandémie – mise à rude épreuve et pourtant solidaire», cliquez ici. 

Plus forts ensemble – la solidarité au-delà des classes d’âge

Une contribution d’Alain Huber, Directeur de Pro Senectute Suisse

Depuis un an, le coronavirus est au cœur de toutes les préoccupations en Suisse. La pandémie est un défi de taille – pour tous, y compris pour Pro Senectute, organisation qui assiste les personnes âgées et leurs proches dans toutes les régions du pays. Cette crise a mis en évidence la fragilité de la «normalité» et le rôle important que joue la cohésion entre les générations pour un bon fonctionnement de notre société. Dans ce contexte, le credo de notre organisation «Plus forts ensemble» s’est, une fois de plus, vu confirmé, que ce soit dans le développement du dialogue entre les générations ou dans notre travail quotidien. Au cours des douze derniers mois, les 24 organisations cantonales et intercantonales de Pro Senectute ont travaillé d’arrache-pied pour savoir qui avait besoin de quelle aide. En plus de l’offre existante, elles ont rapidement mis en place d’autres services, notamment dans le domaine de l’assistance à domicile, pour faciliter la vie quotidienne des personnes ayant besoin d’une protection particulière contre le coronavirus. Des émissions spécifiques à la télévision les ont par exemple incitées à faire des exercices physiques et à entretenir leur mobilité devant l’écran; divers services d’assistance facilement accessibles ont été introduits, et la livraison de nourriture et de produits de première nécessité à domicile a été assurée. Grâce à la grande solidarité des plus jeunes, le projet AMIGOS est devenu, en un an, le plus grand réseau de bénévoles du pays. Ceci prouve qu’il existe chez nous une grande volonté d’aider dans une situation d’urgence. Cela souligne en outre que les nombreux bénévoles plus âgés qui, du jour au lendemain, se sont vus interdire de poursuivre leur engagement habituel, constituent des piliers dans notre pays et sont donc «d’importance systémique». Il s’agit maintenant de tenir bon, de continuer à offrir un soutien entre les générations et de maintenir ces différents services pour les plus vulnérables.

Aujourd’hui, pour se protéger du virus, de nombreuses personnes âgées vivent depuis longtemps dans l’isolement. Après une si longue période, nous sommes tous constamment appelés à penser à elles, à leur téléphoner, à leur demander comment elles vont, si tout va bien pour eux ou si elles ont besoin que quelqu’un leur fasse une course ou apporte un colis à la poste. Le coronavirus leur a en effet imposé un repli sur leur sphère privée qui les prive de contacts sociaux. L’incertitude quant à la durée des privations et notamment à celle de l’isolement social est un fardeau supplémentaire pour elles. Elles s’interrogent: Quand pourrai-je revoir toute ma famille de façon régulière? Quand pourrai-je à nouveau voyager librement dans les transports publics? Quand les activités de tous les jours, les courses à mon magasin habituel par exemple, ne représenteront-elles plus un risque pour moi? Alors que la Confédération va progressivement assouplir les mesures anti-coronavirus, il sera primordial pour les seniors au cours des semaines, voire des mois à venir, de persévérer, de ne pas s’exposer à un risque d’infection, et de continuer à utiliser l’aide proposée – qu’il s’agisse de l’assistance téléphonique assurée par l’un de nos quelque 130 points de contact dans tout le pays, du service d’achats et de livraison AMIGOS, de l’un des nombreux services de repas fournis par Pro Senectute ou de la possibilité de demander le passage du facteur à domicile pour effectuer un envoi.

Le vaccin contre le COVID-19 est une lueur d’espoir pour Pro Senectute. Elle permet d’espérer qu’il sera bientôt plus facile de vivre avec le virus. La vaccination devrait permettre de réduire au maximum le nombre de personnes malades. Il s’agit notamment d’éviter les maladies graves et mortelles liées au coronavirus. Réduire l’incidence des cas de COVID-19 n’est pas seulement dans l’intérêt de chaque individu, mais aussi dans celui de la société dans son ensemble. Moins il y aura de personnes qui tombent malades, moins il y aura de risques que le système de santé soit surchargé. Ainsi, pour Pro Senectute, c’est une question de solidarité entre jeunes et moins jeunes: les personnes qui le peuvent devront se faire vacciner.

Espérons que nous pourrons, tous, tirer quelque chose de positif de cette crise. Nous constatons aujourd’hui que notre communauté – jeunes en bonne santé et personnes âgées particulièrement vulnérables – a très bien fonctionné au cours des derniers mois si difficiles. Nous avons pris conscience qu’ensemble, en tant que société, nous sommes capables de surmonter bien des choses, et cela aura une influence sur la manière de notre «vivre en communauté» et sur la façon dont nous affronterons les défis futurs. Pro Senectute reçoit chaque jour des messages de personnes qui proposent leur aide pour permettre à ceux qui sont dans le besoin à cause du virus d’être soutenus. Nous constatons également que de nombreux particuliers réfléchissent à la manière dont ils peuvent maintenir le contact au sein de la famille et entre les générations. Ainsi, certaines familles ont instauré des rendez-vous quotidiens au téléphone ou par Skype pour que les petits-enfants et les grands-parents puissent échanger. Toutes ces bonnes nouvelles me font envisager l’avenir avec confiance. Les manifestations de solidarité au-delà des classes d’âge se sont multipliées et renforcées au cours de ces derniers mois, phénomène encourageant. Ce qu’il faut, c’est parvenir à un «vivre ensemble» qui fonctionne – et éviter de dresser les générations les unes contre les autres.